Je parlais hier au soir, avec une amie, au téléphone, et nous devisions de nos nouvelles approches
des choses en cette période confinée que nous vivons, nous qui avons dépassé la trentaine!😁 Elle me disait que, parmi les sortes de rituels qu'elle vivait, elle aimait fermer les volets de sa maison le soir, quand tombe la nuit.
Entre espace public et espace privé, entre masculin et féminin, la fenêtre, passage frontalier avec ses volets ailes de papillon, bat la mesure du temps.
Voici, en clin d' oeil, le texte de Francis Ponge:
Le volet
Volet plein
qui bat le mur, c'est un drôle d'oiseau qu'un volet.
Qui ne s'envole mie.
Et sedésarticule-t-il
? Non. Il s'articule. Et crie.
Par les gonds de son aile unique rectangulaire.
Et s'assomme comme un battoir sur le
mur.
Un drôle d'oiseau cloué. Cloué par son profil, ce qui est plus cruel ou qui sait ?
Car ilpeut battre de l'aile. Et s'assommer à sa guise contre le mur. Faisant retenir l'air de ses cris et de ses coups de battoir.
Vlan, deux fois.
Mais quand il nous a assez fatigués, on le cloue alors grand ouvert ou tout à fait fermé.
Alors s'établit le silence, et la bataille est finie:
je ne vois plus rien à en dire.
Dieu merci, je ne suis donc pas sourd !
Quand j'ai ouvert mon volet ce matin, j'ai bien entendu son grincement, son cri et son coup debattoir.
Et j'ai senti son poids.
Francis Ponge
Le parti pris des choses