Au fil des mots

EPHEMERIDE

 

 

On écrit d’abord parce que d’autres avant vous ont écrit”.

Julien Gracq :

"A Chartres, où un soleil éclatant m'engage à me rendre pour une visite de quelques heures entre deux trains:l'envie de revoir les vitraux m'est venue brusquement, attisée par la relecture des premières pages de La Cathédrale de Huysmans"

En lisant, en écrivant P.173

&

 

"Les livres permettent, comme la musique, un partage de désirs.

J’ouvre LA NUIT DU CŒUR pour finir l’année en beauté.

 Christian Bobin, à Conques, devient pour la lectrice que je suis, le temps d’un jour et de deux nuits « l’ami, l’hôte de hôtes, Zarathoustra. » selon Nietzsche.  

 Je viens de quitter un amical lever de soleil méditerranéen du côté de Sète, devenu époustouflant au-dessus de Vallauris, d’embrasser Chagall à Aix en Provence, de vivre Noël parmi les jouets dans les crèches de mon cœur sur La Côte d’Azur puis à Castres au pied de la montagne noire, mystérieuse comme un vitrail de Soulages, dans l’abbatiale près de laquelle je me pose, colombe à la Picasso, dans un hôtel au charme ancestral, sûre d’avoir trouvé un nid brodé d’ardoises moussues à fleurir de mots.

 « Parfois, d’un rien, une fête surgit » écrit Bobin.

 L’amour, quand il prend un visage, réjouit le cœur. Et c’est, dès mon arrivée dans la nuit, comme au lever du jour, le visage de l’abbatiale qui s’offre à ma vue. Je ne sais quelle harmonie entre la pierre blonde et ses gris feutrés chante, suspendue au ciel et ancrée dans les pavés médiévaux ; je ne sais quel miracle de la rencontre entre les lignes du Moyen-âge et celles des vitraux contemporains, tantôt horizontales comme celles d’une portée musicale, tantôt obliques comme des vagues océanes, murmure à la lumière une berceuse hors du temps apaisant tous mes tourments et qui s’appelle Beauté.

 Je ne sais si j’aurais aussi bien entendu les sons du jour si je n’avais pas lu les pages de Bobin, certainement pas : ses mots ont aiguisé mon ouïe et, quand, devant le tympan de l’abbatiale silencieuse en cette matinée du 30 décembre 2018, passe un ange noir branché qui écoute une musique rock insolite, je ne sais si je suis d’ici ou d’ailleurs, d’hier ou d’aujourd’hui. Alors, entrant dans la froide cathédrale de pierres, curieuse sous le regard malicieux des curieux de Conques, je suis happée par la lumière douce qui nappe et réchauffe l’esprit du lieu. Une neutralité bienveillante descend des vitraux de Soulages : l’artiste s’est humblement effacé pour que jouent les gris, les bleus ou les orangés du jour, pas la couleur rien quela nuance d’un sanglot long d’un violon verlainien qui berce le cœur du poète blessé.

Dans les ruelles aux ocres chaudes, sur les murs où s’adosse le temps, à travers les branches nues des arbres en hiver, plane, danse et rit une brume duveteuse assortie aux vitraux. Tant d’élégance discrète en un lieu, en un jour, triomphe de tous les opiums de l’époque."

Anny C.

Extrait de "Dans le désir de..."

inédit

Commentaires

06.04 | 06:20

Emerger de notre vivier , aprés y avoir puiser toutes les émotions . Ecrire , cry...

10.10 | 11:28

Aimer ne se négocie pas - oh que non. L'amitié non plus. Amour Amitié ces de...

25.01 | 06:56

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06.08 | 13:40

Bonjour Anne Marie, Quel plaisir d'écouter Pascal Quignard, que je n'ai ...