Au fil des mots

EPHEMERIDE

"Il m'a été donné, au lendemain de la mort de Gustave Caillebotte, de faire le rapide voyage d'Argenteuil et d'entrer dans cette maison où tout disait encore la présence vivante de la veille,
de croire que le maître du logis allait rentrer, parcourir les pièces, s'asseoir, causer, reprendre ce livre à page de la lecture commencée, travailler à cette toile encore fraîche sur le chevalet.
Mais ce n'est que l'illusion tenace et mensongère de la vie continuée.
La Mort silencieuse et invisible a fait son oeuvre, a arrêté subitement les pas, la voix, le geste, clos l'existence de l'homme.
Tout est aujourd'hui semblable à ce qui était hier, hormis que l'habitant n'est plus là. Il est entré,il est sorti, et rien n'est changé du décor de son existence.
La maison a la même gaieté, entre les champs et la Seine, en face d'Argenteuil. Les bateaux se balancent sur l'eau soyeuse. Tout est doré par le soleil du nouveau printemps.
Dans le jardin, au long des plates-bandes, dans les clairières du bois minuscule, dans les interstices des pierres qui forment un piédestal rocheux et la serre, partout, la verdure déplie ses bourgeons, les fleurettes brillent comme des yeux enfantins, des pousses vivaces trouent la terre.
Tout ce petit monde végétal étiqueté, choyé, adoré par Caillebotte, est exact au rendez vous qui lui avait été donné.
"Vous verrez mon jardin au printemps"
disait-il à ses amis, au dernier dîner des Impressionnistes.
Le printemps est venu, le jardin se pare pour l'éternelle fête. Un chien triste parcourt les allées.
C'est la monotone et banale histoire de l'homme. " Quand la maison est bâtie, la Mort entre ", dit le proverbe arabe."
"

Gustave Geoffroy

Commentaires

06.04 | 06:20

Emerger de notre vivier , aprés y avoir puiser toutes les émotions . Ecrire , cry...

10.10 | 11:28

Aimer ne se négocie pas - oh que non. L'amitié non plus. Amour Amitié ces de...

25.01 | 06:56

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06.08 | 13:40

Bonjour Anne Marie, Quel plaisir d'écouter Pascal Quignard, que je n'ai ...