«… L’autre jour, on vint me dire : « Madame, il fait chaud dans le mail [promenade ombragée où l’on jouait au mail, sorte
de jeu de croquet : cf. maillet], il n’y a pas un brin de vent ; la lune y a fait des effets les plus plaisants du monde. » Je ne pus résister à la tentation ; je mets mon infanterie sur pied ; je mets tous les bonnets, coiffes
et casaques qui n’étaient point nécessaires ; je vais dans ce mail, dont l’air est comme celui de ma chambre ; je trouve mille coquecigrues [les coquecigrues de Rabelais sont des animaux fantastiques], des moines blancs et
noirs, plusieurs religieuses grises et blanches, du linge jeté par-ci, par-là, des hommes noirs, d’autres ensevelis tout droits contre des arbres, de petits hommes cachés, qui ne montraient que la tête, des prêtres qui
n’osaient approcher [Marcel Proust admirait ce passage impressionniste]. Après avoir ri de toutes ces figures, et nous être persuadés que voilà ce qui s’appelle des esprits, et que notre imagination en est le
théâtre, nous nous en revenons sans nous arrêter, et sans avoir senti la moindre humidité. Ma chère enfant, je vous demande pardon, je crus être obligée, à l’exemple des anciens, comme nous disait
ce fou que nous trouvâmes dans le jardin de Livry, de donner cette marque de respect à la lune : je vous assure que je m’en porte fort bien. »
Commentaires
06.04 | 06:20
Emerger de notre vivier , aprés y avoir puiser toutes les émotions . Ecrire , cry...
10.10 | 11:28
Aimer ne se négocie pas - oh que non. L'amitié non plus. Amour Amitié ces de...
25.01 | 06:56
MAGISTRAL, DEVOS
06.08 | 13:40
Bonjour Anne Marie, Quel plaisir d'écouter Pascal Quignard, que je n'ai ...